Prologue.
Voilà un an, à la demande de mes enfants, je me lançais
dans la rédaction de mes souvenirs d'enfance et d'adolescence. Ces quelques
pages ayant reçu une audience favorable, même en dehors du cercle de ma propre famille, on m'a suggéré
de poursuivre sur ma lancée par la relation de mon vécu en tant que militaire engagé dans
l'Armée de l'Air .
J'ai déjà écrit quelques pages sur le sujet, mais il ne s'agissait là que d'exposer chronologiquement mes états
de service en me référant aux documents officiels en ma possession. Ici, il s'agira plutôt
de raconter comment j'ai ressenti cette période un peu particulière de ma vie, considérant
mes antécédents et le contexte de ces années de 1944 à 1963.
Nous sommes en Juin 1944, l'année scolaire de seconde va se terminer
pour moi à l'Ecole N.D. de la Roche (Rhône) Le 6 juin, c'est le débarquement allié en
Normandie. Les classes sont arrêtées un peu en avance, et je rejoins ma famille pour les " grandes
vacances ". Pendant cette année écoulée, j'ai beaucoup réfléchi et déjà
pris ma décision d'interrompre mes études, ne me sentant plus enclin à poursuivre dans la
voie souhaitée par ma famille .
C'est au cours de ces vacances que se réalisera la libération de notre Bresse (le 4 septembre), après
Paris, Lyon, et une bonne partie de la France. Période très mouvementée avec les actions des
F.F.I., la retraite des troupes Allemandes marquée par la destruction des ponts routiers et voie ferrée
de la ville de Louhans. Puis l'arrivée des troupes Américaines qui ne feront qu'un bref passage en
Bresse. Le 2ème Bataillon de Chasseurs à Pied se constitue a Louhans même. La majorité
des F.F.I. s'y retrouve (mon frère Pierre est du nombre) ainsi que de nombreux jeunes. Jean mon autre frère
réfractaire au STO est revenu à la maison mais sera rappelé un peu plus tard au service militaire
pour un vague gardiennage sur la RN.6 aux environs de Tournus.
Pour ma part, de retour à la ferme familiale, je me rends compte que les travaux de culture ne m'emballent
pas. D'autre part, l'exploitation familiale très modeste ne requiert pas de bras supplémentaires.
Approchant de mes 17 ans (28 Novembre), je me fais à l'idée de m'engager dès cet anniversaire,
puisque c'est l'âge minimum requis en temps de guerre. Cette orientation m'apporte au moins la facilité
d'un avenir immédiat. Dès lors, c'est l'Aviation qui devient mon nouvel idéal. Ma famille
ne semble pas s'émouvoir de ce projet. Sans doute pense-t-elle que ce sont là des idées utopiques
ayant peu de chance de se réaliser. Je me souviens qu'en parlant à un oncle chez lequel je travaille
une journée par semaine il m'a fait cette remarque : " Bah ! Militaire, comme curé, ce sont
des métiers de fainéants ! " Il m'en faudrait davantage pour me détourner de cette voie
à laquelle je pense de plus en plus sérieusement.
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